jeudi, décembre 25, 2014

Noël dans la Terre du Milieu

Ma mère est la troisième enfant d'une famille en comptant sept. C'est une femme qui aime Noël, pour ce que cela représente comme partage et chaleur humaine. À tous les ans, elle reçoit sa marmaille, autour de plats longs à manger qui stimulent les discussions et les échanges. Au cours des années, nous avons accueilli, parmi nous, plusieurs esseulés du Réveillon qui ont pimenté nos soirées de leur présence, souvent lumineuse.

Il y a quelques années, c'est un des frères de ma mère, celui qui la suit dans leur fratrie, qui nous à rejoint pour la soirée du Réveillon. Il s'était séparé, et la fête à laquelle il avait l'habitude d'assister avait lieu dans la famille qui n'était plus la sienne. Il y a des traditions comme ça, bien ancrées, qui finissent pas vous laisser seul le soir de Noël. Mais il avait saisi la main tendue de sa sœur, et nous avions tous trouvé que ça avait été la meilleure idée de l'année que de l'inviter partager cette soirée avec nous.

Cette année-là, ses enfants se sont sentis un peu moches, je crois, de l'avoir laisser seul dans la nuit du 24 décembre. Et peut-être aussi étaient-ils un peu tristounets d'avoir manqué un souper avec notre cellule à nous, puisque nous nous entendons tous particulièrement bien. L'année suivante, ils se sont joints à notre souper. Quelque part dans le temps, Noël a perdu ses repères, mais avant de laisser le sol s'évanouir sous nos pied nous avons, il semblerait, réinventé une tradition à notre sauce.

C'est une compagnie bien bruyante qui s'amène dans notre Terre du Milieu, la nuit de Noël. Une compagnie majoritairement masculine aux voix fortes et aux positions campées. Une compagnie qui fait et défait le monde à l'aune de l'actualité et des petits et grands travers de ses divers commettants. Les rires fusent de tous les côtés de la grande tablée où nous restons assis, le plus longtemps possible. Pour savourer les plats que nous préparons en collégialité et pour le plaisir, si simple et si gratifiant, d'être ensemble. Nous parlons fort, passant de diagonales en zigzags dans les fils que tissent les sujets qui nous amènent dans toutes les directions. Il est bien rare de nous en voir faire le tour, d'ailleurs. Ils finissent, pour la plupart, oubliés entre deux chaises.

On se dit souvent qu'on devrait se voir comme ça, plus qu'une fois l'an. Mais la vie a ses propres impondérables et, bien entendu, nous n'en faisons rien. Mais je crois que nous attendons tous le courriel de ma mère, un jour d'automne, qui nous confirmera que nous sommes, encore une fois invités, à partager avec elle la veille de Noël.

Je crois qu'aucun d'entre nous ne manquerait ce souper pour tout l'or du monde.

Et ça, à mon avis, c'est le plus précieux cadeau que nous puissions espérer des années qui s'achèvent.

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