dimanche, novembre 01, 2015

Halloween

Dans un autobus pratiquement vide, un 31 octobre, un clown squelettique est assis devant moi. Pour faire rire sa compagne, il tente de m'intimider. Son maquillage et terriblement réussi. Son sourire est lugubre, sauf lorsqu'il sourit pour vrai. Je ne sais pas pourquoi je suis sa cible, peut-être simplement parce que je ne suis pas déguisée et seule. Il prend des pauses envahissantes et étranges, n'ayant de cesse de me fixer jusqu'à ce que la fille à ses côtés lui disent vertement de laisser la pauvre femme (moi) tranquille parce ça devient gênant. En fait, il n'a absolument pas réussi à me déranger, je suis bien à l'abri entre les écouteurs de mon baladeur, le nez plongé dans un livre.

Au coin d'une rue d'un quartier résidentiel, un Père-Noël (adulte) à la peau basanée et à l'accent hispanique, monte en compagnie d'un Olaf, d'un Winnie l'ourson et d'un Tigrou qui doivent avoir entre huit et trois ans. La grande Olaf s'assoie à côté de moi et entreprend de regarder le contenu de sa récolte sans déballer un seul bonbon. Je sens, sans vraiment regarder ce qu'elle fait, ce qui lui plaît ou non dans ce qu'elle découvre. Les deux autres sont assis de l'autre côté de l'allée, de part et d'autre du clown qui ne semble pas du tout les effrayer. Le Papa-Noël est debout et surveille avec attention sa couvée, surtout le petit tigre qui donne l'impression de mourir d'envie de tout déballer et avaler immédiatement.

Deux ou trois arrêts plus tard, le bus se remplit d'un coup. L'attention paternelle en prend pour son rhume : les enfants sont maintenant singulièrement éparpillés, malgré le fait qu'ils n'aient pas bougé d'un pouce. Comme il est juste devant moi, je le sens tendu. Je vois sa tête tourner sans cesse dans toutes les directions, comme pour s'assurer, à chaque seconde, que tout son monde est en sécurité.

Et puis un homme vieillissant, encombré de sacs et de valises se place juste devant Winnie, empêchant désormais son père de la voir. L'homme est seul et parle sans arrêt. Fort. Très fort. Son monologue est décousu. Il y est question de bottes et de destination. Plus les minutes passent, plus il s'agite et s'affaisse sur lui-même. Se penchant presque sur la petite Winnie qui tente vaillamment de garder un air impassible, mais je vois, à son regard qu'elle n'est pas du tout rassurée. Au bout de quelques mètres, elle se met à interpeller son père de sa petite voix un peu paniquée. Mais l'autobus est trop bondé pour que le papa puisse agir rapidement. De toute manière, l'homme descend à l'arrêt suivant avec une bonne moitié des autres passagers. Le clown et sa compagne compris.

Profitant de ce vacuum impromptu, le Père-Noël a regroupé ses petits lutins, sur la même banquette, profitant de l'occasion pour asseoir une Winnie ébranlée sur ses genoux. Un petit mouvement de sa tête m'a fait comprendre à quel point elle était soulagée d'être désormais bien protégée.

Je sais, depuis longtemps, que les soirs d'Halloween regorgent de personnages étranges. Et il m'apparaît désormais évident que les plus effrayants ne sont pas nécessairement ceux qui choisissent de l'être.

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1 Commentaires:

Blogger Unknown s'est arrêté(e) pour réfléchir...

Je reprends le temps perdu, je suis mal à l'aise pour la petite et je comprends ta vigilence et ta compassion

5:29 p.m.  

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