dimanche, janvier 10, 2016

En déconfitures

Il y a des automnes en déconfitures qui se concluent sur des hivers du même acabit.

Je connais des femmes qui ont la témérité de s'engager de nouveau, après des histoires d'amour qui les avaient laissées sur le difficile carreau des meurtries, mais qui, contrairement à moi, ont eu assez de courage pour se laisser aller encore à faire confiance jusqu'à se défaire d'une part de leur cœur, ce que je ne semble plus être apte à faire, depuis quelque chose comme quinze ans.

Je les ai regardé fréquenter les sites de rencontres et autres machins du même genre, un peu septique, un peu envieuse, me faisant croire que je suis trop grosse, trop laide, trop vieille pour rencontrer une personne qui voudrait partager, avec moi, la moitié d'elle-même.

Je les ai vues se donner entièrement parce qu'elles avaient envie d'aller aussi loin que possible, à coup d'audaces, de gestes qui en disaient plus que les mots. Des gestes qui étaient, en réalité, des déclarations claires d'intentions et de sentiments, plongeant à émotions défendues dans les vides sidéral du rejet potentiel. Qui est ma peur, probablement pas la leur.

Je connais des femmes qui se sont vues foudroyer par la mort d'un parent, mais qui auront continué vaille que vaille à se battre, à se définir, à se devenir, à coup de gueule comme de coude. Des femmes qui m'auront confié que cette situation était un peu prévisible, étant donné de la vie et de la personnalité dudit parent, mais qui n'avaient aucun moyen de prémunir devant la mort de l'autre parent qui aura tiré sa révérence aussi rapidement que subitement. Être orpheline avant d'avoir quarante ans est un tribut trop lourd à payer à l'existence, selon moi, et pourtant, ces femmes sont toujours capables de rire, de sourire et d'argumenter sur les sujets qui leur importent.

Je sais des femmes, meurtries jusqu'à la moelle, qui pourraient se lover autour de leur douleur autant personnelle que sans issue et qui pourtant, un jour après l'autre, pour leurs enfants, leurs parents, leur dignité, se sont, malgré tout levées jour après jour, armées de leur seule personnalité et de l'amour incommensurable qu'elles portent, et de leurs idéaux, aussi.

Je connais des femmes qui sont restées droites et fières dans le flot des larmes qui accompagnent les ruptures qu'elles n'avaient ni vues venir, ni préméditées et encore moins escomptées.

Ce soir, je voudrais leur dire que je les admire, et surtout que je les aime, pour ce qu'elles sont, très exactement.

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