mercredi, juin 01, 2016

The Time of my Life

À cette époque, ma grande amie habitait dans ma cours, la plupart du temps. Enfin, elle habitait dans une maison qui donnait sur la cours familiale et son père avait percé une porte dans la clôture grillagée, l'ensemble de nos parents craignant sans doute que nous ne nous cassions le cou à force de l'escalader pour aller de l'une chez l'autre, ce que nous n'aurions pas manqué de faire, si les grands moyens n'avaient pas été pris.

Quelquefois, par contre, elle était chez sa mère qui restait très loin en transport en commun. Il m'arrivait de l'accompagner pour la fin de semaine. J'adorais ces expéditions hors du quartier qui m'avait vu grandir. Par une fin de semaine de février, il me semble, nous avions apporté des cassettes vidéos en location dans nos bagages. Trois films différents, mais nous avions fini par n'en écouter qu'un seul, tellement nous l'avions aimé, six fois de suite, si ma mémoire est fidèle. C'était Dirty Dancing.

Nous aimions déjà beaucoup les films de danse. Sans doute parce que ni l'une ni l'autre n'avions aucun talent dans le domaine et, pour ma part, comme je suis à peu près aussi souple que du bois mort, j'étais (et je suis toujours) fascinée par ce langage corporel que je n'avais aucune chance de pouvoir, un jour, pratiquer. Ce film était arrivé dans ma vie au prélude de mes quinze ans. Ma fibre romantique battait déjà à tout rompre, je ne pouvais qu'être totalement sous le charme.

Évidemment, mes souvenirs de l'époque sont un peu confus, étant donné toute la distance qu'ils présupposent. Il me semble que le printemps et l'été qui on suivi ont été jalonnés par ce film. Comme si nous l'avions écouté à toutes les journées de pluie et que nous avions joué à être Baby tous les jours où il faisait beau, dans la piscine chez mes parents, ou lors des innombrables pique-niques qui nous amenaient dans les divers parcs jalonnant la piste cyclable du boulevard Gouin. Il nous arrivait, bien entendu d'écouter autre chose, mais nous y revenions toujours. Tellement qu'on s'était mises à l'écouter en anglais et que j'ai commencé à comprendre quelque chose à cette langue parce ce que je connaissais tellement tout le texte en français que je pouvais percevoir ce que les acteurs se racontaient, dans la langue originale. Je ne dis pas qu'il s'agit ici de mon film favori, pas du tout en fait. Il est cependant celui que j'ai vu le plus souvent, et de loin.

Hier, j'ai été voir la comédie musicale tirée du film. Il y avait du féminin dans la salle Wilfrid-Pelletier au pouce carré, c'était fou. De tout âge, en plus. Il y régnait une fébrilité toute adolescente, malgré le fait que je devais me situer dans la moyenne d'âge. Mais l'esprit de la foule, lui, avait quelque chose comme quatorze ans.

La magie a opéré. L'histoire, était remarquablement fidèle à celle du film, avec quelques ajouts qui ne la défiguraient pas. Bon, le jeu des comédiens était, disons aléatoire, et certains effets spéciaux pour refaire des scènes dans un lac, ou une voiture étaient, mettons, grotesques, mais dans l'ensemble, je crois que toutes les fans dans la pièce étaient assises sur le bout de leur chaise et savouraient avec délectation le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux.

Évidemment, l'important dans ce film, c'est la scène finale; le moment où Baby, se révèle au monde. Je pense que je n'étais pas la seule à l'attendre parce qu'à la première mesure de (I've had) the Time of my Life, j'ai eu l'impression que le toit de Wilfrid-Pelletier allait sauter.

Je suis revenue chez-moi à pieds, riant toute seule, heureuse comme je ne l'avais été depuis longtemps. Et j'ai réécouté le film original, deux fois plutôt qu'une.

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