vendredi, août 24, 2007

Comme un murmure sur l'oreiller

Les amours à distances m'ont toujours fait un drôle d'effet. Comme si l'absence fabriquait de toute pièce une présence autrement inexistante. Réminiscence éthérée des sensations quintuplant les impressions. Ainsi mon corps se rappelle de ton corps, mes doigts sentent sur les draps les courbes de tes fesses frémissante sous l'effet de mon toucher. Une chaleur diffuse émanant du matelas, souvenance de la régularité de ton souffle durant les heures de sommeil. Quiétude de la complicité établie malgré le fait que ta vie quotidienne ne soit pas la mienne et que tes semaines t'emportent loin de moi.

Je ferme les yeux pour voir tes lèvres cramoisies de désir quand tu me dis que tout de mon corps est pour toi une invitation à l'amour. Malgré mes doutes, malgré mes lacunes de confiance, malgré mes les rondeurs de mon ventre qui me mettent souvent mal à l'aise. Je t'entends rire et me parler de mes hanches, de mes seins de mes cuisses dans des termes que je ne répéterai jamais à personne, mais que je repasse sans cesse dans le même ordre lorsque je me langui de toi. Alors je souris dans l'obscurité, et je t'écris en pensée des lettres enflammées te narrant tout ce que je pense de bien de toi. Toutes les petites et grandes envies que ton souvenir permanent font naître dans mes tripes. Quelquefois je téléphone pour t'écouter dire mon prénom de cette manière qui t'es si particulière comme si ce mot dans ta bouche était un fruit particulièrement savoureux, empreint d'une signification qui échappe aux autres.

Je me compte chanceuse de te connaître, de nous connaître dans cette intimité qui n'appartient qu'à nous. Dans les rires échangés en catimini, dans les longs repas du soir qui s'étirent sur la couette et qui reviennent me hanter de leurs délices chaque fois que je me retrouve seule dans ce lit qui te connaît par coeur. Je te revois faire semblant de dormir encore sous quand le soleil du matin s'attarde sur le blanc de ta peau et que je t'assaille de baisers que tu tentes d'ignorer jusqu'à ce que tu me prennes vivement dans tes bras en me disant : « petite, c'est encore la nuit cesse de me fatiguer ». Et moi je ris, de ce rire de gorge que tu aimes tant.

Je préfère d'ailleurs tes visites aux miennes, parce qu'il me semble que la distance entre nous et nous est moins longue lorsque j'ai avec moi toute la semaine des souvenirs de nos deux jours de bonheur. Ces échappées dans le temps qui me font éclore à la vie. J'adore conserver la vision te ton appétence lorsque je mords farouchement ta paume juste avant de te laisser partir et que les lueurs coquines dans tes yeux se rappellent à moi durant tous les jours de ton absence. Mais plus que tout, ce sont les morceaux de vêtement pas vraiment oubliés, gisant entre mes draps. Parfum de toi, comme un murmure sur l'oreiller qui te ramène à moi.

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samedi, août 11, 2007

Les fruits de l'entêtement

2004. J'avais atteint le fond. Impression de vivre dans une substance aussi gluante qu'inconfortable. Mes perceptions étaient complètement faussées. Je ne me voyais plus que comme la somme de mes dettes : un échec complet. Sans possibilité de reprendre le dessus sur cette vie qui n'était pas clémente avec moi. Un drame perpétuel. L'odeur de dépression. J'ai tout de même fini par me sortir de la vase dans laquelle je m'était enfoncée. J'ai attrapé une perche déposée devant moi pour me sortir de l'immobilisme. Un premier automne sous le signes des tournées en autocar. Un emploi facile à décrocher sans entrevue réelle, parce que durant cette saison la demande de guide est si grande. Un bon moyen d'instaurer le mouvement. Et puis, j'ai osé. Oser aller porter mon cv dans une librairie où j'ai toujours voulu travailler, il y avait tellement de livres, tellement de choix. Ce jour-là, on m'a proposé un emploi de caissière. Moi qui rêvais d'être la libraire. J'ai accepté malgré le fait que je n'avais pas très envie de passer mes grandes journées à la caisse. J'ai accepté parce que lors de cette entrevue d'embauche, le directeur qui était devant moi m'a affirmé que sa supérieure immédiate avait elle aussi commencé à la caisse.

J'ai fait mes preuves. Effectué des heures supplémentaires. Été plus que disponible pour des changements d'horaires à la dernière minutes. Avec en tête l'idée que je finirais par devenir directrice. Directrice-adjointe pour commencer. J'ai été me chercher des formations à l'intérieur de ma succursale, comme libraire-jeunesse, commis papeterie-cadeaux, libraire, chef-caissière et responsable de quart. Changeant mon horaire hebdomadaire pour favoriser certaines de ces formations. On m'a proposé de prendre une place comme représentante du syndicat, ce que j'ai refusé parce que je voulais garder toutes mes chances de passer de l'autre côté de la clôture.

J'ai passé une première entrevue pour un poste de directrice-adjointe il y a plus d'un an. Une longue attente. Et les papillons dans le ventre à tous les jours pendant ce printemps tellement difficile pour une jeune femme qui était, en somme, en rémission. Puis le refus. Et les larmes. Difficile refus. Difficile de croire encore en moi à ce moment-là puisqu'on m'avait préféré quelqu'un venu de l'externe qui n'avait aucune espèce d'expérience en librairie. J'ai retroussé mes manches, parlé avec mon directeur. Essayé de parfaire mon tableau d'expérience dans le réseau. J'ai reçu beaucoup d'aide de mes supérieurs immédiats qui voyaient bien à quel point j'avais ce désir franc et sincère de devenir un jour directrice-adjointe. Et puis une autre opportunité s'est présentée six mois plus tard. Autre entrevue, nouvelles nuées de papillons dans l'estomac. Nouveau refus. Plus difficile encore sur mon estime personnelle.

Retour dans la vase. Enchaînée encore au divan du salon. Mes drames meublaient mes jours. J'étais convaincue de déranger tout le monde, certaine de ne pas valoir ma propre chandelle. Descente dans à l'orée du pays des zombies. Rattrapée de justesse par ces gens avec qui j'habitais qui ne m'ont pas laissée m'enfoncer. Ils m'ont tenu la main, montré que je leur étais importante. Ils m'ont dit « je t'aime » lorsque c'était important parce que je n'y croyais plus. Toutes ces déceptions, je les ai vécues en public. Sous votre regard empathique. Ce qui me donnait l'impression que cette succession d'échecs prenait une ampleur encore plus grande.

Alors lorsque j'ai appliqué une fois de plus sur un poste de directrice-adjointe, je me suis tenue coite. Ça pris deux semaines avant que j'en parle à ma mère. Encore davantage avant que j'en parle avec mes amis, sauf ceux de la librairie qui le savaient parce que tout se sait dans ce réseau. Longue attente encore une fois. Pour cause de vacances qui se chevauchent et retardent les réponses. Longue attente qui a pris fin jeudi à 16h30. À partir du 27 août 2007, je serai directrice-adjointe de la succursale des Galeries d'Anjou.

Ne venez jamais me dire que je ne suis pas persévérante ni que l'entêtement ne porte pas fruits.

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mardi, août 07, 2007

De toutes les couleurs

Sur les pages blanches de nos ébats en devenir, j'ai vu se dessiner ton visage en perpétuelle mutation. Sujet aux changements de mes inspirations, de mes aspirations. Arborant des traits vieillissants au fur et à mesure que j'avançais en âge et en expérience. J'ai rêvé ce doigté fin qui pétrirait mes formes jusqu'à les faire les plus belles du monde sous le charme des caresses, qui me diraient plus certainement que n'importe quel discours enflammé, que ce que je suis est très exactement le sujet du désir. J'ai laissé mon imaginaire tracer au fusain des yeux amoureux surplombant ces fossettes rieuses qui m'ont toujours fait craquer.

Je me suis enfoncée dans les aquarelles de mes songes qui m'apparaissaient plus vraies que ce que la vie m'offrait. Intransigeante jusqu'à la moelle, refusant de me plier à des amours qui ne me semblaient pas aussi réelles que les teintes diaphanes des tableaux passionnés meublant mes rêves éveillés. Point pour moi de demie-mesure. Jamais je n'ai su m'y faire. Toujours intense, toujours intègre, lovée sur ces idéaux qui me font écrire depuis que je suis capable de mettre les mots les uns à côté des autres. J'ai dépecé les pastels de mes déceptions sans amertume. En prenant chaque écueil comme un outil qui ferait de moi une meilleure personne, une femme plus sereine, une meilleure amoureuse en devenir.

J'ai croisé des hommes qui me demandaient sans autre forme de procès si je n'étais pas homosexuelle, moi qui dégage cette plénitude qui donne l'impression que je n'ai besoin de personne pour me suffire à moi-même. J'ai croisé d'autres hommes qui auraient voulu me présenter tous leurs amis mais qui n'auraient jamais eu l'idée de se présenter à moi. J'ai pleuré des histoires qui inachevées qui n'avaient même pas commencé. Sans rancune. Je ne suis pas faite de ce bois-là. Et malgré le fait que je sente souvent l'absence sous le pinceau de cette existence qui me laisse seule sur le pas des portes que j'ai vues se refermer, je ne suis pas une femme malheureuse. Je me rends bien compte que je ne changerais pas les choix que j'ai faits.

Je suis née pour aimer jusqu'à la lie. Je suis née pour être aimée tout aussi intensément en retour. Je ne sais plus à quoi tu ressembles et au fond ça n'a pas vraiment d'importance. Quelle que soit la couleur de tes prunelles, quelle que soit la texture de ta chevelure, quelle soit la dorure de ton épiderme, je sais bien que je te rencontrerai au prochain tournant. Prêt à me suivre dans mes délires, prêt à attendre que j'en revienne à d'autres moments. Prêt à partir dans tes propres univers lorsque tu le sentiras nécessaire. Moi je suis apte désormais à en voir de toutes les couleurs, à pleurer, à rire ou tout simplement à sourire sereinement. Prête à fonder la famille que j'ai toujours voulu avoir. Prête à écrire. Prête à rêver les toiles éclatantes que ce que nous pourrons devenir, à deux.

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