mercredi, mai 31, 2017

Déconfiture

Quelquefois, je me dis que je suis passablement innocente en ce qui concerne la technologie. Comme chacun le sait, j'écoute continuellement la radio d'Ici Première. Par conséquent, ça fait des lunes que j'entends causer de toutes sortes de baladodiffusions qui semblent plus stimulantes les unes que les autres. Et comme j'ai des horaires très variables, je manque souvent des émissions qui me plaisent ce qui fait que j'ai fini par m'abonner auxdites balados. Dans ma très grande naïveté, je croyais que celles-ci étaient stockées sur mon appareil et fonctionnaient un peu comme un enregistrement musical. Que nenni, aie-je appris à mes dépends : ça prend de la bande passante ces petites bêtes-là. Aussi me voici actuellement, avec 18 jours encore à faire sur mon forfait de téléphone avec plus (dans le sens de zéro) de données.

Parallèlement à cela, j'ai obtenu ma clé Bixi il y a une semaine et depuis je frétille quotidiennement en utilisant ce service. Il m'est si agréable de prendre un vélo, devant la maison, le matin pour me rendre au métro Berri, gagnant ainsi un temps précieux dans mon transport. Et puis surtout, je reviens à la maison en vélo, du moins, quand la température le permet. Mais bon, le Bixi demeure un service de transport en commun et en libre service, ce qui implique forcément qu'il y a un paquet de petits irritants potentiels.

Ce matin donc, j'avise un beau vélo tout neuf, cuvée 375e anniversaire (donc mis en service le 17 mai dernier). J'aime bien les nouveaux vélos parce qu'ils ont sept vitesses plutôt que trois et que cela facilite les montées. Bon d'accord, je ne monte pas grand chose pour me rendre à Berri, néanmoins, c'est ce vélo que j'ai choisi. Mal m'en pris. Sitôt déverrouillé, je m'aperçoit que le vélo a une crevaison sur le pneu avant. Visiblement, la tripe est fendue d'un bout à l'autre. Évidemment, je ne pouvais pas remettre le vélo dans les bornes où je l'avais pris. Je me suis donc rendue à la borne la plus près, tant bien que mal et j'ai essayé de verrouiller la chose. Rien n'y fait. Je commence à être un peu découragée, comme il se doit, et je continue mon chemin vers la prochaine borne. Pas plus de succès. Et comme mentionné en début de texte, je n'ai plus de données sur mon téléphone et je commence à avoir vraiment peur de ne pas être capable de remettre le vélo à une borne avant la fin de ma période de gratuité.

Les nerfs en boules, je tourne sur une petite rue au coin de laquelle je sais qu'il y a une borne et je vois un technicien Bixi en train de monter un vélo abîmé dans son camion. Me sentant sauvée, je vais le voir et lui explique mon problème. Le gentil monsieur m'explique que je ne suis pas capable d'encrer le vélo parce que le pneu est tellement bas qu'il ne rejoint pas le mécanisme de verrouillage. Il le verrouille, pour libérer mon utilisation. Il reste bien un vélo, que je peux pas utiliser parce que trop peu de temps s'est écoulé entre la fin d'une utilisation et le début d'une autre. J'étais, pour dire le moins, déconfite. Mais le gentil technicien m'a déverrouillé un vélo pour me permettre de me rendre a destination. Sauf que, lorsque j'y suis arrivée, il n'y avait plus de borne à l'endroit où j'en ai toujours vue une durant les dernières et où j'ai garé les vélos toute la semaine passée. Punaise...

Revenant sur mes pas, j'ai garé le vélo à quelques 200 mètres et je me suis rendue au métro. Résultat, j'ai mis 27 minutes pour me rendre à Berri ce matin. Itinéraire qui dure 20 minutes à pieds ou 6 a vélo. Comme j'ai une trouille indescriptible d'être en retard dans la vie, j'ai fini par arriver au travail juste à l'heure, mais franchement, je ne peux pas dire que mon expérience matinale du vélo en libre service fut concluante.

N'empêche qu'en voyant le beau soleil à ma sortie du magasin ce soir, j'ai récidivé et j'ai pédalé jusqu'à la maison. Mais j'ai vérifié l'état des deux roues avant de choisir mon véhicule...

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dimanche, mai 28, 2017

Gérer mes extensions

J'ai toujours eu de la difficulté à gérer mes extensions. Comprendre par-là que j'ai une certaine tendance à oublier un paquet de trucs un peu partout, surtout des affaires utiles. Toutes les personnes qui me connaissent, dans mon quotidien. vous diront que je dois souvent revenir sur mes pas, parce que j'ai oublié mes clés sur le bureau en quittant et que je dois ouvrir le lendemain, et autres petits détours du même genre. Gérer mon téléphone fut un long apprentissage : penser quotidiennement à le mettre dans mon sac ou mes poches avant de quitter maison ou travail, n'a pas été facile. Combien de fois, particulièrement quand j'avais un rendez-vous amical tout de suite après le boulot, me suis-je aperçue que mon téléphone était resté quelque part à la maison et que j'étais rendue beaucoup trop loin pour revenir sur mes pas? Je ne saurais le dire.

Et voilà que dans ce fabuleux mois de mai que je viens de vivre, je me suis munie d'une autre extension. En effet, j'ai enfin décidé de changer mes lunettes. Je portais la même paire depuis 10 ans. Et si j'ai beaucoup aimé ces lunettes, je savais depuis longtemps qu'elles étaient plus que dues. Quand le métal est rongé, on peut dire que l'objet a atteint le bout de sa vie utile. Mais bon, remplacer ses lunettes n'est pas donné et j'ai préféré, dans les dernières années, investir dans des voyages, histoire de me changer le mal de place. Et puis, ma vue ne s'est pas dégradée durant toutes ces années alors à tout prendre, je préférais m'épivarder sous d'autres tropiques plutôt que d'investir dans des lunettes.

Sauf que, changement de prescription ou pas, je commençais à craindre que ces appendices finissent par se rompre au moindre choc et que je trouvais que le look papier collant sur l'arrête du nez ne serait pas des plus seyant. J'ai fini par faire affaire avec une lunetterie qui offre un deux pour un et je me suis ainsi procuré une paire de lunettes soleil adaptée à ma vision. C'est la première fois que j'en ai et je dois dire que ça fait une agréable différence de voir quelque chose quand on se protège les yeux du soleil.

Mais bien entendu, cela suppose une nouvelle extension à gérer. L'étui de mes lunettes soleil à l'air d'un gros portefeuille obèse moucheté comme la fourrure d'un léopard. Il n'est ni subtil, ni discret. Quel que soit l'endroit où je le pose, je le vois. Ce qui ne m'empêche aucunement de l'oublier un peu partout. Encore hier soir, je suis partie de chez une amieS en le laissant sur la table de la cuisine, lunettes solaires incluses. Évidemment, aujourd'hui, il fait un soleil radieux, rien que pour narguer ma tête de linotte...

Dans le bureau de la direction à Laval, j'avais une liste au mur qui me rappelait de vérifier que j'avais bien mes clés de bureau, celles de la maison, mon baladeur, mon téléphone et les bonnes chaussures avant de partir. J'avais fini par ne plus vraiment en avoir besoin, ayant appris à vivre avec toutes ces extensions.

Aujourd'hui, j'ai l'impression qu'il me faut revenir à la case départ et réapprendre une nouvelle liste qui inclus un étui à lunette, parce que si je peux vivre quelque jours sans les lunettes soleil, je me vois d'ici prise avec seulement celles-ci sur mon nez et je ne suis pas certaine que j'ai tant envie que cela d'expérimenter le Sunglasses at Night, peu importe l'affection immuable que je porte à l'auteur de cette chanson.

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jeudi, mai 25, 2017

Allumer des étoiles

Il me semble que j'avais quelque chose comme 11 ans, peut-être un peu plus. J'étais dans une allée d'épicerie quand j'ai entendu, pour la première fois Sunglasses at night. Je ne sais toujours pas très exactement ce qu'il y avait dans cette chanson, mais ça m'est tombé dessus comme une tonne de briques. Je commençais depuis quelques temps à m'intéresser à la musique pop, même si ce n'était pas une activité franchement recommandée à l'école que je fréquentais. Mais, les voisinage n'allait pas à la même école que moi et conséquemment je subissais son influence. C'était l'époque où il fallait choisir entre Michael Jackson et Boy George, celle ou une fille ne pouvait pas aimer Corey Hart et Brian Adams. Je préférais Boy George, je le trouvais différent et bien entendu, mon faible pour Corey Hart n'a fait que se développer de plus en plus, jusqu'à ce que ce penchant devienne une source d'amusement pour mon entourage.

Je n'avais été voir la tournée Boy in the Box, mes parents me trouvaient trop jeune pour un spectacle au Forum. Ils avaient sans doute raison. J'avais cependant été immensément déçue. Il n'était donc pas question que je manque le concert suivant. Je ne me rappelle plus du tout du prix des billets, je sais que la plupart de mes amis trouvaient que cet artiste était dépassé. Mais, ma cousine et moi on était convaincues que c'était LE spectacle à voir dans nos vies. Nous avions eu le droit d'y aller à condition qu'un adulte nous accompagne et c'est ma mère qui s'y était collée. Je me rappelle du spectacle, bien que vaguement. Néanmoins, je sais que j'en suis sortie revigorée, émerveillée et heureuse. Ceci étant dit, je crois que j'avais eu au moins autant de plaisir à préparer cette aventure avec ma cousine à en parler des heures et des heures au téléphone et à compter les dodos jusqu'au jour J.

C'était une sorte de rite de passage : la première grosse activité culturelle que je choisissais de faire en dépit de l'avis de tout un chacun, parce que j'en avais envie, parce que je voulais voir les étoiles s'allumer moi aussi. Pas celles du ciel, celle de mes yeux et de ceux de tous ces autres qui étaient présents ce soir-là. Je mettais le premier pas dans mon indépendance d'être humain. Une première étape dans l'affirmation de ma personnalité en développement. J'aurais pu ne plus du tout aimer l'artiste en vieillissant, il s'avère que cela arrive fréquemment de nos jour, mais comme je suis une indécrottable fidèle, je n'ai pas encore cesser de l'apprécier.

Ce sont les réflexions qui me viennent, quand je pense au massacre de Manchester. Je trouve odieux qu'on ait ciblé des jeunes filles en fleurs qui ne voulaient rien d'autre que d'avoir l'impression de faire partie, ne serait-ce que pour une seule seconde, de la vie de l'artiste qu'elles aimaient de tout leur cœur. Elles voulaient, elles aussi allumer des étoiles, devenir tranquillement une personne à part entière.

Assassiner des fleurs parce qu'on a peur de perdre un pouvoir qu'au fond on n'a pas vraiment.

Je saigne pour elles et pour toutes celles qui n'auront jamais la chance d'aller voir ce type de concert parce que la peur aura tisser des entraves à leur développement.

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dimanche, mai 21, 2017

Un certain degré de liberté

J'ai eu un choc quand on m'a appris, récemment que j'avais terminé de payer mes dettes d'études. Je ne suis pas certaine d'en avoir mesurer, sur le coup, toutes les conséquences. Un peu comme à un jour anniversaire, on ne se sent pas plus vieux que la veille, mais on sait qu'une année de plus s'est écoulée et qu'on doit l'ajouter à notre curriculum personnel. Au fond, ça ne change rien de bien tangible, mais ça modifie tout en réalité.

Pendant toutes les années durant lesquelles j'ai patiemment payé mes dettes, j'ai été pauvre plus souvent qu'à mon tour. J'avais fait des choix, des choix discutables, mais en toute honnêteté, j'oserais affirmer qu'à certains moments, je m'étais retrouvée en l'absence de choix, et que ma survie impliquait de ne pas toujours payer ce que je devais, genre à des compagnies de crédit. Ce qui fait que je n'ai aucune espèce de forme de crédit depuis quelque chose comme 2004.

L'air de rien, c'est assez limitant. Surtout avec l'explosion des nouvelles technologies. Si certains me trouvent vieux jeu de m'acheter encore des films et des albums musicaux sur support physique, il y a une part de fait que je ne pouvais rien obtenir autrement. Parce que même s'il existe un paquet de cartes pré-payées de toutes sortes de machins, la plupart des abonnements demandent tout de même une vraie carte de crédit pour ouvrir un compte. Il me fallait donc tout le temps quémander. Auprès de ma mère, en premier lieu, de certaines amies aussi quelquefois. L'un dans l'autre, je dirais que j'avais beaucoup le sentiment que si j'étais adulte dans mes responsabilités et mon travail, je ne l'étais pas tout à fait dans ma vie personnelle.

Lorsque j'avais parlé à la responsable de mon dossier au Ministère de l'éducation (je payais mes dettes d'études directement à cet endroit tellement je n'avais pas de crédit), elle m'avait annoncé toute joyeuse, que je pouvais désormais faire une demande de crédit parce que le gouvernement ne s'opposait plus à ce que j'en obtienne. Bon... C'est tout dire. Dire que je n'y croyais pas, est un euphémisme. Par peur de la déception, j'ai repoussé la demande pendant un certain temps. Et puis, je me suis dit que je voudrais bien m'abonner à Bixi pour revenir du travail en vélo. Alors, j'ai osé et obtenu.

J'ai bien l'intention de bien utiliser ce minuscule degré de liberté qui m'est imparti. Je n'ai aucune espèce d'envie de me retrouver à nouveau coincée dans des dettes plus grandes que moi. Mais... Je me suis effectivement abonnée à Bixi (j'attends ma clé avec impatience), j'ai acheté des billets de tennis et je me suis offert un nouvel ordinateur. Pas un bolide de fou super cher, un petit ordi léger comme tout, dont la pile fonctionne et qui ne met pas 10 minutes à démarrer à chaque fois que je veux l'utiliser. D'ailleurs, ma famille a contribué largement à cet achat pas du tout impulsif. C'était mon cadeau d'anniversaire.

Cependant, le plus beau cadeau d'anniversaire que je me suis offert cette année c'est d'entrer enfin complètement dans ma vie adulte puisque je puis désormais m'assumer toute seule. Ça m'aura pris du temps, mais au fond, j'y suis arrivée...

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mercredi, mai 17, 2017

L'angle du rire

J'avais passé la journée à bouger des tables de présentation. Celles-ci sont particulièrement lourdes, même vides. J'étais donc fourbue. C'est ainsi que je m'étais laissée tomber dans un banc vide avec une certaine forme de délectation. D'ordinaire, je lis ou je joue à n'importe quoi sur mon téléphone. Je lis plus souvent. Mais il m'arrive de ne rien faire parce que j'ai le cerveau qui baigne dans sa propre bouillie. Après une telle journée, j'étais dans cet état de vide mental. Alors je me suis rabattue sur l'observation des autres passagers, au cas où je pourrais y trouver un sujet.

Je n'avais eu l'occasion de jouer à l'observatrice muette bien longtemps puisque juste devant moi se trouvait le journaliste que j'avais servi un peu avant Noël et dont j'avais reconnu la voix. Il ne m'avait pas vue, de toute manière, je serais fort surprise que mon visage lui eut rappelé quoique ce soit. Étrangement, je m'étais demandée récemment, en écoutant un de ses reportages si moi je le reconnaîtrais, en supposant que non puisque mon contact avec lui était demeuré sa voix. Faut croire que de le saluer hebdomadairement de mon salon (sans qu'il n'en sache rien, évidemment) a imprimé son visage dans ma mémoire, parce que dès que je l'ai vu, j'ai su que c'était lui.

Je me suis prise à m'imaginer quelle serait sa réaction si je me levais pour lui dire : « Bonjour monsieur B, je suis la libraire qui vous a reconnu à la voix l'hiver dernier, là c'est votre visage que j'ai replacé ». Et je me suis mise à rigoler toute seule au grand plaisir de quelques quidams qui me voyaient et ne comprenaient pas pourquoi une femme assise toute seule dans le métro avait un tel fou-rire. Lui ne m'avait pas vue, il y avait désormais une foule entre nous. Ce qui, au bout du compte n'avait aucune espèce d'importance, parce que je m'amusais tellement toute seule avec mes idées saugrenues que j'aurais eu sans doute beaucoup moins de plaisir si d'aventure il aurait fallut que je les partage.

Lorsque de temps à autres, les passagers s'écartaient assez pour que je risque de le voir encore, je baissais systématiquement les yeux, histoire de me donner une chance de rester anonyme. Évidemment, je continuais à me raconter des chimères le concernant, rien de fleur bleue ou d'un tant soit peu romantique, seulement une flopée d'accroches plus absurdes les unes que les autres qui me faisaient juste rire davantage. Quand il était sorti de sa bulle, un peu ahuri, pour sortir précipitamment une station avant moi, j'avais rentré ma tête dans mes épaules et tourné celle-ci dans l'autre direction, comme s'il y avait une chance qu'il m’aperçoive, et surtout qu'il me reconnaisse suffisamment pour comprendre ce qui me faisait rire à ce point.

Bref, la conclusion à laquelle mes fabulations étaient arrivées, c'était que je peux bien me dénoncer dans le cadre du travail, ce sera perçu comme un compliment, mais qu'il y un pas qu'il vaut mieux ne pas franchir si on ne veut pas passer pour une jeune femme énamourée. Et que je ne crois pas qu'un journaliste radio, un peu timide ait le même genre d'accueil à ce sujet qu'une vedette pop, par exemple.

Décidément, quand on prend le parti de prendre la vie du bon côté, on peu passer un bon moment à peu près dans n'importe quelle circonstance, même quand on est vanné.

Peut-être surtout dans ce cas, en fait.

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dimanche, mai 14, 2017

Grosse semaine

On a eu une bien drôle de semaine. D'abord Papa et Maman on décidé qu'on ne dormirait plus dans nos chambres au sous-sol, mais qu'on dormirait en haut. Je n'ai pas très bien compris pourquoi, ce que je sais par contre, c'est que mon Papi, lui, est toujours au sous-sol depuis quelques jours. Alors je cours très vite jusqu'à la barrière quand je me lève le matin et je l'appelle : « Papapa ! Papapa ! » Des fois, il ne réponds pas, mais des fois, j'entends sa grosse voix pleine de rire et je le vois monter les marches pour venir me faire un câlin.

Et puis, il y a des bruits bizarres dans la maison, comme un gros ronron de chat géant. « Vrrrrrrrrrrrrr, vrrrrrrrrrrrrrrr » comme cela, sans arrêt. Et il y a plein d'étrangers qui vont et viennent. Ils vont tous visiter le sous-sol et parlent fort. Je suis toujours un peu gêné avec les gens que je ne connais pas alors je me cache dans les jambes de Maman. Heureusement, il reste des choses normales, comme la garderie avec tous les amis que j'aime.

Aujourd'hui, je suis allé chez Grand-mamie. Tout seul. Papa et maman m'y ont amené passer l'après-midi. Je devais faire ma sieste, mais mon ami Martini, le chat de Grand-mamie, n'arrêtait pas de parler. Alors je n'ai pas dormi. Et puis Francis et arrivé. Je suis toujours content de le voir, je dis « Sansisssss ! » quand je le vois. Quand Tatie-Mathie est arrivée à son tour, je lui ai aussi dit : « allo Sansissssss ». Elle a rit et m'a dit gentiment : « mais non, je ne suis pas Francis, je suis Mathilde, moi. Ma-thi-lde. Je sais bien qu'elle n'est pas Francis, elle n'a pas de barbe ! Mais c'est tout pareil, une grande personne que j'aime et que je ne vois pas souvent.

Tatie-Mathie m'a encore apporté des livres. J'aime les livres, alors je lui ai fait mon plus joli sourire et je me suis décidé à quitter les jambes de Grand-mamie pour aller les regarder un peu. Je lui ai aussi montré un très beau livre que j'ai déjà. Il est plein de couleurs avec des petites portes que j'ouvre très bien tout seul. Je sais ce qui se dissimule derrière les portes alors je peux montrer les camions cachés et toutes ces belles choses que je connais. Quand Maman et Papa sont arrivés, j'ai fait une petite blague à Maman, elle me tendait les bras dans le corridor et moi j'ai couru vers elle, mais au dernier moment j'ai bifurqué et je me suis jeté sur ma grand-maman. Tout le monde a ri et j'étais très fier de ma blague.

On se voyait pour la fête des mères et pour fêter l'anniversaire de Tatie. J'étais très fatigué parce que je n'avais pas fait ma sieste, alors je ronchonnais un peu durant le repas. Mais j'ai repris toute ma bonne humeur quand j'ai vu le gâteau. Comme il était devant Tatie, j'ai voulu être sur ses genoux pour les chansons d'anniversaire. Je disais « feu, feu » parce qu'il y avait des chandelles sur le gâteau. J'ai voulu aider Tatie à souffler ses bougies, mais elle a été trop rapide pour moi et je n'ai rien soufflé du tout. Comme j'étais déçu, Grand-mamie a rallumé une bougie et je l'ai soufflé comme un grand. Après j'ai applaudi bien fort.

On est parti presque tout de suite après avoir mangé le gâteau, il était si bon que j'ai volé un morceau de celui de Tatie. Mais avant de partir, je lui ai donné mon cadeau à moi, j'ai dit bien clairement : « Tatie » en lui envoyant un bisou d'au revoir.

C'était une belle journée, pleine d'aventures. Je suis si fatigué que je pense que je vais dormir bien fort jusqu'à demain en rêvant à toutes ces belles choses qui me sont arrivées.

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jeudi, mai 11, 2017

Pays candide

Lorsque j'ai changé de succursale à l'automne dernier, j'ai fait la connaissance avec une jeune personne avec laquelle j'ai tout de suite su que la collaboration serait féconde et stimulante. Je crois que nous avons rapidement compris que nos sens de l'humour étaient précisément compatibles. Il émane d'elle une telle candeur, une absence presque complète de la peur du ridicule qui ne pouvaient faire autrement que de m'amuser grandement, si ce n'est de me charmer carrément.

Si je me plais à écrire des histoires, elle a le chic de les raconter de vive voix. Son sujet de prédilection est incontestablement les aventures qui la mettent en scène lorsqu'elle s'est retrouvée dans une situation ridicule. Alors elle me les raconte spontanément, sachant que je serai un public de premier ordre pour ce genre d'anecdote.

Un midi qui suivait une matinée rude pour moi, le genre de matinée où j'avais eu maille à partir avec des clients mécontents pour des raisons diverses, elle avait entrepris de me raconter comment elle avait un jour décidé de suivre les indications d'un GPS pour aller de la région de Québec à celle de Sallaberry-de-Valleyfield et que d'une mauvaise indication à une autre, elle avait fait un petit détour par Terrebonne, avant de finalement arriver à destination. Le tout avec moult détails sur toutes les pensées qui avaient accompagné les diverses étapes de ce rocambolesque retour à la maison. J'avais ri à en avoir mal aux côtes et il vaut encore mieux aujourd'hui que je ne m'attarde pas trop à penser à cette aventure sans quoi j'ai le rire qui me reprend de manière assez intempestive. Il va sans dire qu'elle avait grandement contribué à changer l'humeur de ma journée.

C'est le type de personne qui, même dans ses mauvaises journées, prend systématiquement le pari de faire contre mauvais fortune bon cœur. Elle m'avisera, à l'avance, qu'elle ne sera pas au mieux de son efficacité, et si je peux de visu constater qu'elle est capable de multiplier les bourdes de manière assez ahurissante, aucune d'entre elles n'a d'effet désastreux si ce n'est un ralentissement évident de son rythme de travail. Ce qui est préférable à une attitude boudeuse ou agressive, selon moi.

Quelquefois, je crois qu'elle a le sentiment que je me moque un peu d'elle, tellement tout ce qu'elle me dit me fait rire. Jamais je n'oserais cependant, j'aurais beaucoup trop l'impression de saper une force vive dans son élan immatériel. Ceci dit, je suis tellement ricaneuse qu'il m'est souvent impossible de me retenir.

Je présume que, comme tout le monde, elle a ses heures de bouette lors desquelles elle n'est pas la jeune personne pétillante avec laquelle j'ai l'habitude de travailler, mais elle les garde à la maison. Ce qui fait qu'elle est devenue, pour moi, dans les six derniers mois un îlot de frâcheur, un petit pays candide auprès duquel il fait bon respirer.

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dimanche, mai 07, 2017

Les pieds dans l'eau

Dans la maison où j'ai grandi, les printemps humides étaient chose fréquente. Il y avait bien une pompe près de la porte menant à la cave, mais on constatait fréquemment qu'elle peinait à sa tâche et les dernières marches devenaient inexistantes quelque temps. Par conséquent, j'ai longtemps assimilé l'odeur d'humidité à celle d'une cave. Comme je détestais me laisser surprendre par une mince couche d'eau quand je devais aller chercher quelque chose dans le congélateur qui était situé au fond de ladite cave.

Je ne sais pas comment mes parents géraient la situation, financièrement s'entend. Moi, je disais que nous étions inondés, sauf que j'ai compris qu'il s'agissait davantage de dégâts d'eau que d'inondation. Nous n'avons pas eu à évacuer la maison pour ces raisons, jamais. J'ai toujours dormi les pieds au sec, quoique j'aie pu en penser à l'époque. Bien entendu, le 14 juillet 1987 avait laisser entrer quelques millimètres d'eau dans la cave, cependant je garde davantage un souvenir de panne d'électricité, de chatte qui accouche et des images étonnantes de l'autoroute Décarie qui avait l'air d'une rivière davantage que d'une autoroute avec des voitures dont on voyait à peine l'habitacle, le reste étant sous la ligne de l'eau.

Il y a quelques années, ma sœur, fraîchement propriétaire d'une nouvelle maison, a vu son sous-sol être complètement inondé. Je sais que ça été une période très difficile pour elle et son amoureux, mais je ne crois pas en comprendre la réalité encore aujourd'hui. Je n'ai vu que des photos et si j'ai eu des échos de ce qu'ils vivaient, j'avais encore trop de colères et de frustrations latentes en moi pour être apte à en mesurer toute la portée. Je n'étais pas particulièrement familièrement fréquentable, aussi aie-je été sagement laissé dans l'ignorance de ce qui se passait au quotidien. Je sais cependant qu'ils ont tenu le coup, en partie, parce qu'ils avaient le Club à quelques minutes à pieds pendant l'été qui a suivi ce désastre. Alors ils y vivaient plus que moins pendant qu'ils reconstruisaient leur nid, pierre par pierre, c'est le cas de le dire.

Le temps passant, ma mère en est aussi devenue membre, pour profiter d'un bout de campagne à la ville et aussi de sa nouvelle vie de grand-maman. Cet endroit bucolique est donc devenu, un haut lieu de plaisirs estivaux. Mais voilà que ce matin j'ai vu des photos du Club totalement inondé. Plus de piscine, plus de terrain. Juste la rivière qui s'est étendue tout partout. Le refuge n'a même plus une île pour se réfugier lui-même.

Ce n'est pas grand chose, comparativement au drame réel que vivent plein de Québécois de toutes origines qui perdent beaucoup plus que simplement un lieu convivial ou il fait bon se reposer. Néanmoins, j'ai aujourd'hui le sentiment que ce printemps trop mouillé est en train de faire un énorme pied-de-nez à l'été et ses jours de farniente programmés.

J'ose quand même espérer que nous saurons collectivement tirer un certain parti de ces événement éprouvants. Un petit brin de solidarité, serait, me semble-t-il, bienvenu.

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mercredi, mai 03, 2017

Question de dignité

À mon arrivée sur le quai, celui-ci était déjà bondé et pourtant le tableau afficheur indiquait que le prochain train entrerait en gare seulement cinq minutes plus tard. C'était un jour de semaine quelque part entre 11h30 et midi, la foule était à la fois dense et bigarrée. Ce qui m'avait frappée, par ailleurs, ce n'était pas tant la densité, cela arrive souvent à ces heures comme si toute la population s'était donnée rendez-vous pour sortir dîner quelque part, et la pluie qui battait les pavés à l'extérieur coupait toute envie de faire une petite ou moyenne distance au grand air. Ce qui m'avait frappée, en réalité c'était l'ambiance anxiogène qui régnait sur le petit bout de quai sur lequel je m'étais arrêtée.

J'ai vite compris qui en était la cause. Un grand et beau jeune homme, entièrement vêtu de noir, avec à la taille le genre de linge que porte souvent les serveurs de restaurants chics. J'ignore quel était le point de départ de tout le tintamarre qu'il faisait, mais il haranguait copieusement une minuscule vieille dame qui semblait avoir peur de lui. Il parlait de propreté et d'estime de soi et visiblement tout le monde était aussi mal que la vieille dame et personne ne réagissait, moi comprise, ce dont je ne suis pas fière. La pauvre dame était avec une amie, tout aussi vieille qu'elle et elles se tassaient sur le bord du mur pendant que le jeune homme arpentait le bout de quai en vilipendant bien fort le mépris dont il se disait victime.

Sérieusement, j'étais figée, et j'avais peur. Comme tous les autres quidams assemblés sur la scène. Du coin de l’œil, j'avais vu une jeune fille, quatorze ou quinze ans, à vue de nez, prendre les jambes à son cou et se rendre vers le centre de la station. J'avais cru qu'elle fuyait la scène mais je m'étais trompée. Elle seule avait eu le courage de poser un geste, elle était allée chercher un couple de policiers qui étaient arrivés en moins de deux sur la scène. Ils avaient intercepté le jeune homme, tout à fait poliment tandis que le train entrait finalement en gare et que celui-ci déversait un certain nombre de ses passagers pendant que d'autres y entraient à la vitesse grand v, comme pour mettre le plus rapidement possible une distance entre les événements récents et leur personne.

Comme c'est souvent le cas, les jeunes personnes se sont précipitées sur les sièges vides et les deux dames qui s'étaient collées sur le mur se sont retrouvées debout au milieu de la foule. Ça me fâchait, mais comme je ne m'étais personnellement pas pressée pour rentrer dans le wagon, je n'avais aucun siège à offrir à personne. C'est une femme visiblement enceinte qui a proposé son siège à une des dame, celle qui avait été haranguée. La dame avait refusé, mais le premier geste avait comme réveillé les autres passagers et un jeune homme, que je croyais alors pris dans l'autisme de son téléphone, avait poliment proposé son banc. La dame l'avait regardé jusqu'au fond des yeux avant de lui répondre avec gentillesse : « Merci jeune homme, mais vous savez, pour l'instant, j'ai besoin de me tenir debout ».

Ce qu'elle avait fait, avec beaucoup de dignité.

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