dimanche, janvier 28, 2018

Charger la neige

Je suis une bibite profondément urbaine. Je suis née et j'ai grandi sur l'île de Montréal et il ne me serait jamais venu à l'idée d'aller m'installer en banlieue, même si j'y ai travaillé. Si j'aime beaucoup le bucolique des campagnes, je crois que je ne m'y sentirais pas tout à fait à l'aise, au quotidien. Bien entendu, j'ai pris des chemins de travers en Estrie lors de mes études universitaires, n'empêche que je vivais toujours en ville qui, quoique de plus petite dimension, demeurait une ville centre.

Je n'ai pas de permis de conduire, ce qui fait que j'utilise les transports dits actifs depuis toute ma vie. Je peux donc dire que j'ai vu bien des chaussées et des trottoirs durant mon existence et par conséquence affirmer que la rue Jean-Talon est l'artère commerciale la moins bien entretenue qu'il m'ait été donné de fréquenter en plus de quarante ans de pratique. L'hiver y est un calvaire et ça fait deux ans que je m'y colletaille.

Après chaque chute de neige, les bancs de neige sont laissés en bordure des trottoir jusqu'au dernier jour du ramassage. Immanquablement. Ce qui fait qu'au moindre redoux, les coins de rues se transforment en mare glacées de slush. Ce qui ne rend pas l'endroit particulièrement invitant pour les piétons, ce que je trouve très ironique étant donné que la plupart des gens qui habitent ainsi dans le cœur d'une ville aiment généralement se déplacer à pied dans leur quartier.

Bref, hier soir en sortant sous une petite pluie d'hiver, j'ai rapidement pu constater que les quelques mètres qui me séparaient du métro n'allaient pas être du gâteau. Premièrement, les abrasifs avaient déserté l'énorme plaque de glace qui menait du magasin à la station et deuxièmement les mare de gadoue s'étaient transformées en piscines, voire en lacs. Faisant un large détour sur la rue Henri-Julien pour arriver à presque passer à sec, je suis restée l'air bête au coin de la rue Drolet.

Là, rien à faire, toute l'artère était inondée. Si je regardais du côté sud, l'eau allait au moins jusqu'à la cinquième maison et du côté nord, eh bien c'était la rue Jean-Talon. C'est quand même cette option que j'ai suivie pour me retrouver gros-jean-comme-devant, de l'autre côté de la rue prise entre les voitures stationnées, celles qui circulaient et un énorme banc de neige qui tenait davantage de l'iceberg que d'autre chose. À quatre pattes sous la pluie, j'ai entrepris de l'escalader, manquant de me rompre le cou à plusieurs reprises et vivant une peur certaine au moment de la descente vers le trottoir en contre-bas.

Je m'en suis sortie d'une seule pièce, le cœur battant d'un émoi dont je me serais bien passé et en espérant de toute mon âme que la prochaine fois que j'aurais à passer par là, le chargement de neige serait enfin terminé.

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jeudi, janvier 25, 2018

Des fois, j'ai peur un peu des fois

Ce n'est pas tant que je veuille m'acharner sur toi, mais dans le pays d'hiver que nous partageons, il me semble que je te vois davantage durant les périodes de froidure. Probablement que c'est lié au fait que pour te réchauffer tu t'aventures plus régulièrement parmi les masses, dans ces endroits ou grouillent les quidams qui se pressent vers diverses destinations.

Mon problème, tu vois c'est que tu as le chic de me faire un peu peur. Alors, forcément, dans de telles situations, j'ai tendance à être un peu plus sèche que je ne voudrais. Quand je te croise sur le coin d'une rue à 6h30 le matin, que le soleil n'a pas encore daigné montrer le bout de son nez, que les rues sont passablement désertes et que je suis une femme seule et toi un grand bonhomme qui me crie : « Madame, madame! » C'est plate, mais il y a des bonnes chances que je joue à celle qui n'a pas entendu.

Idem si on se croise autour de 21h30 sous un lampadaire brinquebalant et pas tout à fait fonctionnel. Non, je ne m'arrêterai pas. Parce que je sais que tu me demanderas de l'argent, un café ou je ne sais quoi d'autre et que je ne peux pas te donner tout ce que tu me demandes, plusieurs fois par jour, je finirais par ne plus pouvoir payer mon loyer. De toute manière, j'ai promis à quelqu'un qui a déjà vécu comme toi de donner beaucoup aux organismes et le moins possible aux mains qui se tendent en attendant la prochaine dose.

Je t'ignorerai tout autant si tu me cries après parce que j'ai baissé les yeux en te voyant allumer une cigarette dans un endroit interdit. Ce n'aurais peut-être pas été mon premier réflexe, d'ordinaire, je te regarde dans les yeux et je te salue, mais si tu te fâches la fois ou je ne le fais pas du premier coup parce que ta boucane me pique les yeux, il est probable que je change mon itinéraire dans les semaines qui suivent juste pour éviter de te croiser parce que tu es incroyablement fidèle à tes points d'ancrage.

Et si tu t'approches discrètement de moi sur une rame désertée, assez en tout cas pour que je puisses sentir ton souffle sur mon visage quand tu me demandes poliment si j'ai de l'argent à donner, il se peut que je me fige totalement et complètement avant de reculer de plusieurs pas. Il se peut aussi que tu interprètes mon recul comme du mépris ou quelque chose dans le même genre. Ce n'en est pas, c'est beaucoup plus platement de la peur.

Peur d'un certain inconnu, en partie, mais aussi peur de la perte de mon espace vital que tu as si bien piétiné.

J'aimerais vraiment ça ne pas avoir peur de toi, mais je me rends bien compte que suis incapable de m'en empêcher.

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dimanche, janvier 21, 2018

Je suis damnée

Des fois, j'aimerais ça avoir des outils face à la maladie mentale. Pas la mienne, celle-là, ça va. Elle existe certes, sauf que je sais quoi faire pour ne pas qu'elle prenne toute la place dans ma vie. Je voulais dire, celle que je peux sentir chez d'autres sans savoir exactement de quoi elle retourne.

Il y a quelques temps, un jeune homme est entré dans le magasin. Vêtu d'une culotte d'habit de neige et d'une veste en polar. Il portait des bottes calfeutrées par des sacs d'épicerie. Ses cheveux était gras et il sentait très fortement l'urine. Il s'est installé au poste d'écoute et a entrepris d'écouter un cd. Je crois qu'il réécoutait continuellement la même trame en fixant l'appareil d'un œil hagard. Il est resté près de deux heures à écouter le même disque en soliloquant dans son coin. Quelques fois, il a éclaté d'un rire épeurant et jetant autour de lui des regards fous comme toutes les personnes présentes étaient censées avoir compris ce qui le faisait rire.

Il n'était pas tant dérangeant, sauf par l'odeur et l'espace qu'il prenait dans un passage très utilisé par le personnel du magasin. Les employés m'en ont tous parlé, ils trouvaient que ça faisait longtemps qu'il était-là et ils étaient de plus en plus mal à l'aise à toutes les fois où ils devaient le tasser pour pouvoir passer. J'ai fini par aller le voir pour lui demander de terminer son écoute rapidement. Comme il avait des écouteurs sur les oreilles, il ne m'a pas entendue quand je l'ai interpellé la première fois. J'ai donc levé le ton en disant : « Monsieur? Il faudrait que vous cédiez le lecteur aux prochains clients qui désirent écouter un disque ». Il m'a fait oui de la tête et presque immédiatement, il a décaché une de ses oreilles pour me dire : « Tu aurais pu me parler sur un ton plus adéquat, être plus respectueuse en t'adressant à moi ». Je n'ai pas répondu en songeant que de discuter avec lui de respect serait une tâche ardue et je suis retournée à mes affaires tout en l'observant de loin.

Quand, cinq minutes plus tard il était toujours planté au même endroit je suis retournée lui parler en faisant très attention au ton que j'employais. Aussitôt, il s'est mis à me singer en me disant que cette fois-ci j'étais trop mielleuse et que je lui parlait comme à un demeuré. Je lui ai répondu que j'étais désolée mais que je ne savais pas comment m'adresser à lui puisque si je lui parlais normalement, il me trouvait bête et que si j'essayais d'être plus douce, il trouvait que je l'infantilisais.

Il a agité les bras au-dessus de sa tête en faisant de grands mouvements circulaires en disant : « T'es comme tous les Québécois, tu ne comprends rien ». J'ai répondu : «  Ça tombe bien, je suis fière d'être québécoise ». Il s'est arrêté, a baissé les bras comme des couperets avant de dire : Dans ce cas, je te damne pour l'éternité ».

Sur ce, il est sorti, la tête haute, comme s'il venait de remporter une implacable victoire pendant que les employés laissaient aller leur fou-rire en me répétant que j'étais damnée.

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jeudi, janvier 18, 2018

Sursauts dans le temps

Il me semble parfois que le temps file à une vitesse folle ou encore qu'il est parsemé de trous béants. À d'autres moments, cependant, je croirais presque à une certaine synchronicité. Ces derniers temps, j'ai reçu quelques invitations d'amitiés sur les réseaux sociaux qui sortaient tout droit de mon enfance; de l'école primaire, je veux dire. Ça fait un peu étrange de voir apparaître coup sur coup les noms de personnes qu'on a pas vu depuis quelque chose comme trente ans et à qui on n'avait pas vraiment consacré beaucoup de pensées dans l'intervalle.

J'ai croisé l'une de ces personnes aujourd'hui. En discutant avec elle, j'ai compris qu'elle croyait que nous avions été à l'école secondaire ensemble, pas au primaire. Après avoir bien démêlé tous les fils de cet embrouillamini, nous sommes tombées d'accord sur le temps d'école que nous avions passées ensemble, à une classe d'intervalle. Et c'est là qu'elle m'a dit, tout sourire : « Ah, mais c'étaient tellement des belles années, il n'y avait que du beau dans ce temps-là pour moi, autant au primaire qu'au secondaire, c'est sans doute pour ça que j'ai tout mélangé ». Je me suis contenté de sourire et j'ai repris ma route en réfléchissant à tous les degrés de perceptions qui peuvent différencier deux personnes.

À l'école où nous allions, j'étais la tête de turc de ma classe. Je vivais de l'intimidation, même si je n'aurais jamais utiliser ce terme pour décrire ce que je vivais. J'aurais plutôt dit que j'étais rejet parmis mes pairs. C'était un état de faits et j'avais trouvé un paquet de solutions pour contourner le problème et avoir une vie scolaire somme toute heureuse, à commencer par fréquenter des gens qui étaient plus jeunes que moi de deux ou trois ans ce qui me permettait d'avoir un cercle d'amis stimulants malgré tout. Je vivais avec le reste sans trop de difficulté, je crois. Et puis, comme l'école était loin de la maison et que les ordinateurs et l'internet étaient plutôt loin du quotidien, je réussissais à mettre des frontières entre les difficultés vécues à l'école et le reste de mon existence. Néanmoins, je ne pourrais pas dire que dans cette période de ma vie, il n'y ait eu que du beau.

Peut-être à cause de ce que je vivais, j'ai longtemps cru que les gens ne pouvaient pas garder un bon souvenir de moi. Tout ce dont moi je me rappelais en voyant surgir quelqu'un provenant d'un certain passé, c'était la fois ou j'avais eu l'air ridicule et je croyais que forcément, c'était le souvenir unique que quiconque pouvait avoir de moi. Ça m'a pris bien du temps, peut-être même un passage dans le pays des zombies pour venir à bout de cette croyance.

Bref, quand j'ai vu cette autre personne revenir dans ma vie qui me disait à quel point c'était fantastique de pouvoir se reparler après bien des années, j'avais, encore une fois, une perception mi-figue mi-raisin. Parce que je me souviens très bien avoir choisi de couper les ponts avec cette personne parce qu'en grandissant, nos valeurs et nos intérêts n'avaient plus vraiment de rapport entre eux. Et comme cette personne est partie s'installer à l'étranger quelques années après cette rupture pas tout à fait claire, la distance a fait le gros du boulot. Sincèrement, je n'aurais jamais chercher à retrouver cette fille-là, même si j'ai beaucoup plus de bons que de mauvais souvenirs de sa compagnie.

Sauf que les ponts sont retissés, elle est censée me donner des nouvelles à sa prochaine visite dans le secteur. Et malgré tout, je suis assez curieuse d'apprendre ce que l'étranger aura fait d'elle dans les trente dernières années.

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dimanche, janvier 14, 2018

Le téléphone

Maintenant que Noël est fini, à la maison, la vie a repris un rythme plus normal. Je ne passe plus autant de temps dans la voiture et surtout je ne suis plus constamment entouré de gens que ne connais pas beaucoup et qui me parlent quand je n'ai pas très envie de leur parler. Sauf que ça veut aussi dire que je ne vois plus beaucoup Francis et Tatie. Alors, je m'ennuie, un peu, d'eux.

Donc, quand je suis allé faire dodo chez Grand-Mamie vendredi, je m'attendais un peu à les y voir, même si je savais que ce serait juste moi, Grand-Mamie et Martini. J'étais un peu déçu, mais ce n'était pas grave parce qu'on s'amuse tellement ensemble Grand-Mamie et moi que je ne reste pas tristounet bien longtemps. On a fait des casse-têtes, on a écouter des jolies comptines et on les a chantées, on a lu des histoires et on a fait dodo dans le grand lit tous les trois.

Mais, je m'ennuie vite de Maman quand je me réveille le matin. Alors j'étais très content quand elle a appelé tout de suite après le déjeuner. On a fait un spécial de parler dans le lit de Grand-Mamie, ce qui veut dire que je pouvais garder ma suce parce que j'étais dans le lit. Je n'utilise la suce que pour les dodos, mais quand je m'ennuie de Maman et Papa parce qu'ils ne sont pas avec moi, des fois, la suce c'est comme un peu rassurant. Maman et moi on s'est fait plein de bisous et elle m'a dit qu'elle viendrait me chercher bientôt. Quand on a raccroché, j'ai vu la photo de Tatie et j'ai décidé de l'appeler.

Elle a répondu presque aussitôt. Elle a dit : « Allo? Allo? » Moi je ne disais rien parce que le téléphone était tout noir. Je ne comprenais pas et je l'ai dit à Grand-Mamie. Alors, dans l'écran noir la voix de Tatie a dit : « est-ce que c'est Zazou qui m'appelle? » Alors j'ai dit oui et Tatie a dit que c'était gentil de l'appeler. Puis j'ai dit : « Je ne la vois pas ». Grand-Mamie m'a alors expliqué que Tatie ne parlait pas au téléphone avec l'écran. Ça c'est vraiment bizarre. Mais tout d'un coup, elle est apparue. Fiou, j'étais enfin en pays de connaissance : en la voyant je pouvais lui parler.

Je lui ai raconté que j'avais chanté avec Grand-Mamie et que j'avais fait dodo avec elle et Martini. J'étais très content de moi, parce que je l'avais appelée tout seul et que je tenais le téléphone dans mes main. Tatie disait que ça bougeait beaucoup. Moi, je ne trouvais pas, je voyais toujours son visage dans l'écran. Sauf qu'elle elle disait qu'elle voyait le plafond. Étrange, étrange. Et puis Martini est venu nous rejoindre dans le lit et là, ça ne me tentait plus de parler au téléphone, j'avais beaucoup plus envie d'aller jouer avec mon ami. Grand-Mamie a dit à Tatie qu'on allait raccrocher et j'ai pesé tout seul sur le bouton pour fermer l'écran.

Après, j'ai glissé en bas du lit et je me suis mis à courir partout partout, parce qu'après une immobilité si longue, j'avais franchement besoin de me dégourdir les jambes. Et quand Maman est arrivée, j'étais très fier de pouvoir lui dire que j'avais appelé Tatie et que je lui avais expliqué comment ça marche, parler au téléphone.

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jeudi, janvier 11, 2018

Frousse mouillée

J'ai eu la malheureuse idée, aujourd'hui, de quitter le travail à 17 heures tapantes. Ça ne m'arrive jamais étant donné que nos quarts de travail se terminent toujours à la demie de l'heure. Mais bon, je voulais finir ce que j'avais commencé et aussi souhaiter bon voyage à une collègue qui entamera demain un voyage qui ne sera certainement pas de tout repos pour elle. Bref, j'ai traîné et je suis sortie à la mauvaise heure, c'est-à-dire en même temps que tout le monde.

Résultat; je me suis retrouvée prise dans des foules sans commune mesure avec celles que je fréquente quotidiennement à tous les points de mon trajet jusqu'à la maison. Évidemment, le métro était bondé, les gens pressés et globalement désagréables. J'ai reçu plus de coups sacs-à-dos au visage dans un seul transport que dans toute l'année écoulée, je crois.

Et l'épicerie faisait bonne mesure. Toutes les allées étaient pleines, aucun chariot ni panier n'était disponible, j'ai donc du jouer à l'équilibriste avec les trucs dont j'avais besoin avant de me présenter aux caisses en essayant d'éviter les passants pressés qui coupaient constamment la file tandis que j'attendais patiemment mon tour.

N'ayant aucune espèce d'envie de me promener dans les piscines de gadoues qui décorent actuellement les rues de Montréal, je suis grimpée dans l'autobus qui remonte De Lorimier malgré le fait qu'il soit tellement plein que je n'ai pas pu me rendre plus loin que le chauffeur. Le trajet n'étant pas bien long jusque chez-moi, je préférais de loin cet entassement intempestifs aux dangers potentiels des trottoirs glissants et des coins de rues immergés sous deux pieds d'eau. J'exagère à peine.

Mais voilà qu'en sortant de l'autobus, j'ai senti mon sac-à-main retomber sur ma hanche, tandis que son poids, ou plutôt l'absence de poids sonnait une alarme dans ma cervelle. Je n'ai pas attendu d'être arrivée à la maison pour vérifier mon impression : il ne restait dans mon sac que mes clefs. Pas de porte-monnaie. J'ai tout de suite pensé que j'avais pu l'oublier à l'épicerie et je faisais des messes basses en parcourant les quelques mètres jusqu'à ma porte pour que personne n'ai eu l'idée de se l'approprier.

La première chose que j'ai fait en rentrant a donc été d'appeler à l'épicerie, mais personne n'avait vu mon porte-monnaie. Ce n'est certes pas la première fois que je perds cet objet. J'ai donc commencé par me calmer en me parlant des étapes à suivre lorsque ce genre de désagrément arrive. Premièrement, vider tous les sacs qu'on a sur soi et toutes ses poches. Ce que j'ai donc entrepris pendant que le chat de la maison me miaulait son mécontentement de ne pas me voir me ruer sur son bol pour le nourrir.

Grand bien m'en fit. Je n'avais pas perdu ni m'étais fait voler mon bien, je l'avais rangé dans le sac d'épicerie plutôt que dans le sac-à-main. Rien d'autre qu'une petite étourderie.

Mais des fois les étourderies donnent des sueurs froides, pas agréables du tout.

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dimanche, janvier 07, 2018

Coincée!

J'ai écouté avec attention les deux émissions de récits de Serge Bouchard en fin de semaine. J'ai aimé les contes et les conteurs d'aussi loin que je me souvienne. Alors, bien entendu, si on m'offre une telle occasion de me plonger dans l'Histoire, celles de gens que celle-là néglige trop souvent; je me vautre dedans. Avec la bise intempestive qui nous enveloppe depuis le début de l'année, presque sans relâche, les récits d'innovateurs qui ont travaillé si fort pour nous permettre de nous aménager une vie dans l'hiver, me donnait une impression de douce ironie.

Surtout que je venais tout juste de vivre un épisode m'apprenant, à la dure, que cette saison a toujours des surprises dans sa manche.

Fin de journée au magasin un vendredi soir de grand froid. Les employés ont tous quitté et je termine ma tournée générale pour m'assurer que toutes les issues sont bien verrouillée. Devant le clavier du système d'alarme, je m'aperçois que la porte est restée coincée dans la neige. Je courre donc chercher la pelle afin de dégager ladite porte. Une fois ceci fait, j'arme le système et j'appuie sur la poignée pour sortir. Rien ne bouge. Derrière moi, le système égrène les secondes et je commence à avoir des sueurs froides. Avant d'entendre le grand hurlement, j'arrête le système et je tente à nouveau d'ouvrir la porte. Je suis coincée à l'intérieur.

Dans le magasin, il fait très noir. La seule lumière qui reste allumée pour la nuit est celle du portique principal. C'est donc à cet endroit que je me rends, que j'ouvre les grilles et déverrouille la porte coulissante. Je sors dans le froid et essaie d'ouvrir la fichue porte de sortie par l'extérieur. Miraculeusement, je réussi. Je rentre donc, je retourne fermer les grilles et la porte coulissante, j'arme le système et tente de sortir et je me retrouve à nouveau coincée dans le magasin.

J'étais découragée. Je n'avais pas du tout envie de passer la nuit dans le magasin. Mes autres options de sortie étaient presque nulles étant donné du court délais de sortie du système. J'ai donc appelé mon boss. À deux, on essayais de trouver le meilleur moyen de me faire sortir du magasin quand il a eu l'idée que je puisse bloquer le loquet en position ouverte avant de laisser la porte se refermer pour armer le système. Rebelote avec la porte principale et la grille. De L'extérieur, je réussi à nouveau à entrer par la porte de service. Coincé le loquet par contre, relevait du défi olympique. La serrure et le loquet était gelé. J'étais franchement contente d'être fumeuse et d'avoir un briquet sous la main parce qu'il m'a fallut chauffer la clef et la fichue serrure pour arriver à la bloquer.

J'ai finalement refais toutes les étapes de la fermeture et fini par armer le système en pouvant me glisser dehors par la suite. 21 minutes d'essais et d'erreurs pour sortir du magasin, j'ai trouvé cela un peu fort de café. Je crois que je n'ai jamais été aussi soulagée que lorsque j'ai vu le penne se refermer sous ma clef, assurant ainsi ma sortie et que je courre jusqu'au métro Jean-Talon à vitesse grand V.

Heureusement que j'aime l'hiver, parce que sans cela, cette anecdote serait certainement suffisante pour me faire déménager vers d'autres cieux...

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jeudi, janvier 04, 2018

Aubes hivernales

Le retour tranquille au travail après les vacances de Noël a toujours quelque chose d'un peu décalé. Surtout lorsque, comme c'est le cas cette année, les vacances ont débuté à peine quelques jours, voire quelques heures avant le jour J. Ceci fait en sorte que, pour beaucoup, les vacances ne sont pas encore terminées et ceux pour qui elles le sont se reconnaissent presque d'une journée à l'autre, dans un wagon beaucoup moins bondé qu'à l'ordinaire.

Il me semble que nous prenons tous des habitudes, naturelles, comme les places qu'on prend à table dans une famille nombreuse comme si les noms de tout un chacun était inscrit au fer rouge sur les chaises. Ainsi, dans les derniers jours, j'ai eu le même voisin de banc tôt le matin. Je ne sais pas si il fini ou débute sa journée. Je parierais sur la première hypothèse parce qu'il dort à poings fermés pendant tout le trajet et qu'immanquablement il se réveille en sursaut quelques secondes avant que sa tête ne tombe sur mon épaule. J'ignore quel est son métier, mais il sent discrètement les épices, le curry en particulier. Entre cela et d'autres parfums que l'on peut flairer dans ces espaces restreints, je trouve que me satisfait très bien de ce lot.

Sur le banc en face, il y a cette dame, un peu corpulente, mais pas du tout obèse. Par contre, elle prend beaucoup d'espace. Je me demande quotidiennement comment elle fait. La personne à ses côtés (elle est changeante, contrairement aux autres habitants du wagon) a toujours l'air totalement coincée entre la fenêtre et la passagère qui semble avoir plus de bras, de jambes, de sacs, que la moyenne des ours. Mais surtout, cette dame semble complètement inconsciente que l'espace qu'elle prend empiète immanquablement sur celui des autres.

Il y a aussi un jeune homme qui s'assoit par terre, le dos calé contre les portes qui ne s'ouvrent pas. Il sort son ordinateur portable et tapote furieusement sur le clavier pendant tout son trajet. Il me donne l'impression d'être un étudiant en fin de session à tous les jours. Ce n'est probablement pas le cas, mais ça m'amuse bien de me m'imaginer ce genre de chose. Il est tellement concentré, tellement dans sa bulle que je suis continuellement surprise de le voir se lever d'un bond une fois arrivé à sa station, alors qu'il fourgue rapidement son appareil dans le fond de son sac à dos, comme s'il s'agissait d'un vieux vêtement froissé.

Finalement, il y ce jeune auteur prolifique que je reconnais pour l'avoir vu à la télévision une ou deux fois. Lui aussi est dans sa bulle, il lit armé de surligneurs orange et d'un crayon à mine. Il gribouille des notes presque plus longues que les paragraphes qu'il commente dans les marges et surligne toutes sortes de choses. Visiblement, c'est un homme au travail.

Et moi? Et bien officiellement je lis. Mais en réalité j'espionne, comme il se doit.

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